Les maires de Clérac et d’Orignolles cherchent le moyen d’empêcher l’organisation de ces fêtes illicites et bruyantes dans leurs communes
Sur place, au milieu de nulle part, on comprend pourquoi certains traversent la France pour venir y passer la nuit à s’enivrer de ce que d’aucuns ne considèrent pas comme de la musique et, parfois, d’un certain nombre de substances que la loi réprouve.
Le décor naturel est somptueux. Il faut connaître le dédale des chemins blancs sinuant dans la forêt pour arriver jusqu’ici et ne pas craindre leurs ornières redoutables pour les suspensions.
Ici, dans cette ancienne carrière d’extraction d’argile blanche autrefois exploitée par la société AGS, les lacs sont si verts qu’on les dirait bleus. Mais foin de poésie pour les élus locaux de ce petit coin de paradis qui aimeraient bien que les « raveurs » aillent voir ailleurs si ce n’est pas encore plus beau.
Le tempo très loin
Au « Maine Perrier », on est en limite des communes d’Orignolles et de Clérac.Et Jean-Michel Rapiteau, tout comme Guy Pasquet, régulièrement interpellés dans leurs mairies pour les nuisances de ces fameuses basses promptes à emprunter les vents dominants vers les zones d’habitation à 1 kilomètre de là, cherchent des solutions. La dernière rave party a eu lieu le week-end dernier et la précédente, deux semaines auparavant.
« Le phénomène existe, ici, depuis à peu près cinq ans, parfois même en hiver. On est sur des rassemblements entre 300et 800personnes, venues pour l’essentiel de Charente-Maritime, de Gironde et de Dordogne.Mais on trouve aussi des immatriculations plus lointaines, du Calvados ou d’ailleurs », assure Jean-Michel Rapiteau.
« Tout commence le samedi, vers 23heures, pour se terminer le dimanche, vers 15 heures. Les nuisances sonores sont importantes. On entend la musique comme si on y était.Et même si les gendarmes s’y rendent pour faire baisser le son, les basses poussent le tempo très loin.Des habitants se plaignent de ne pas pouvoir dormir et n’aspirent qu’à un peu de répit après une semaine de boulot.C’est bien normal », confie le maire d’Orignolles qui aimerait pouvoir leur apporter des réponses. Et résoudre, aussi, ce qu’il considère comme des questions de fond, liées à la sécurité.
« On est là en pleines landes, dans une forêt de pins.Comment les pompiers accéderaient-ils au site alors que sur les deux côtés des chemins sont garées des voitures. On arrive aux périodes où les risques de départs de feu sont plus importants. Et puis les anciennes carrières sont devenues de grands lacs et c’est également un risque pour les festivaliers », détaille l’élu qui n’est pas le seul concerné dans ce sud Charente-Maritime.
« Des sites de rave party, il en existe ailleurs, comme à Bussac-Forêt, à Montguyon ou à Chepniers ».
12 lieux de fête ont été recensés
Les gendarmes estiment à une bonne douzaine, dans un rayon de 10 kilomètres autour de Clérac, le nombre de sites privilégiés par les raveurs. Sans qu’à ce jour on ait à déplorer le moindre souci d’ordre public. Du tapage nocturne tout au plus.
Et de fait, sans ces problèmes de nuisances sonores, personne ne saurait qu’une rave party a eu lieu.Et face à ces rassemblements non déclarés dont les annonces circulent seulement sur les réseaux sociaux, via Internet en tous les cas, difficile de mettre en regard des forces sur le terrain. Sans compter que le « remède » serait peut-être plus problématique que le « mal ».
Pour le sous-préfet, « on est sur de l’occupation illicite de terrains privés sans autorisation.Mais si les propriétaires ne déposent pas plainte, comment faire ? »
Quant à la saisie du matériel, elle serait possible sous certaines conditions, pour des rassemblements supérieurs à 500 personnes. Pour ceux inférieurs à 500 personnes, même pas la peine d’y songer.
Propriétés multiples
Alors quoi faire, face à ces rassemblements en pleine nature autour de la musique électronique underground ?C’est la question que ces deux maires se posent face à un site dont les communes ne sont pas propriétaires. On en compte au moins deux au Maine Terrier.
Pour les chemins d’accès, propriété communale, ils ont beau prendre des arrêtés d’interdiction de stationner, « à chaque fois, les panneaux disparaissent. Dès lors, comment les gendarmes peuvent-ils verbaliser ? Et puis, de toute façon, ils ne sont pas assez nombreux ».
Et c’est en ce sens que vient d’avoir lieu, à la demande des deux maires, in situ, une rencontre avec le sous-préfet, Jean-Philippe Aurignac, le directeur de la société AGS, Alain Linglois et son responsable foncier, le capitaine Verdière, commandant en second de la compagnie de gendarmerie, les patrons des brigades de Montguyon et Montlieu-la-Garde.
Pour réfléchir ensemble à ce qu’il serait possible d’envisager : une végétalisation du site par les propriétaires qui devraient donc investir alors même que l’on ne déplore aucun dégât et que l’endroit est laissé impeccable ?
Rendre l’endroit moins attrayant en y creusant des tranchées avec une pelle mécanique et là encore c’est coûteux. Côté chemins, à part les arrêtés d’interdiction de stationner, il n’y a pas grand-chose à faire puisque les accès doivent être préservés pour les pompiers et propriétaires.
Pas sûr qu’on ait trouvé ce soir-là une solution pour empêcher ces rassemblements non déclarés.Et pas sûr non plus qu’on en trouve une.
Orignolles · Clérac · Jonzac
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